Cameroun : La diffamation comme mode d’expression ?
[ Tel, soit disant professeur d’Université viendra s’installer sur un plateau de télévision, distiller doctement la diffamation, l’insulte au nom du sacro-saint principe de la liberté de pensée et la parole .Et on trouvera des foules d’incultes qui viendront applaudir en reprenant en chœur « le grand prof est fort ». « Il a dit ce qu’il pensait » ]
La Voix Des Décideurs – Nous nous souvenons encore à l’époque ou la censure faisait rage au Cameroun. Avant la parution, le journal était envoyé au Ministère de l’Administration Territoriale et Cener (ancien Direction Générale à la Recherche Extérieure) pour un exercice de contrôle. Les textes y étaient charcutés par les fonctionnaires qui parfois ne pigeaient rien à rein.
L’on se retrouvait donc avec des articles de presse ou vides se la disputaient avec non-sens. Le gouvernement ayant constaté que les journalistes commettaient des impairs régulièrement avait décidé d’instituer la censure. Les délits de presse ne relevaient pas encore du pénal.
Puis vint l’époque des libertés tous azimuts. L’ère des vents de libertés. Le gouvernement institua la pénalisation des délits de presse. De nombreux journalistes vont ainsi gouter aux délices du cachot. Reporters Sans Frontières prendra le Cameroun en ligne de mire. Le gouvernement camerounais lâchera du lest et la permissivité que nous constatons à ce jour s’installa au point de s’apparenter désormais à une norme. Emportés par l’air du temps, les magistrats, même les magistrats les plus sévères s’arrimèrent à ce laissez aller.
Ainsi, désormais à l’autel de la liberté de la pensée et de la parole les journalistes se croient investis de tous les pouvoirs. Ils peuvent ainsi insulter, diffamer à satiété, c’est la liberté de la parole. La survenue des réseaux sociaux viendra un peu raffermir cet état de fait. On peut voir donc un quidam niché dans les tréfonds de sa lugubre chaumière insulter proprement un tel qu’il ne connait d’ailleurs ni d’Adam ni d’Eve. Il fait usage de sa liberté de pensée apprendra-t-on.
Tel, soit disant professeur d’Université viendra s’installer sur un plateau de télévision, distiller doctement la diffamation, l’insulte au nom du sacro-saint principe de la liberté de pensée et la parole. Et on trouvera des foules d’incultes qui viendront applaudir en reprenant en chœur « le grand prof est fort ». « Il a dit ce qu’il pensait »
Voilà la société dans laquelle nous vivons. Une société dans laquelle on ne sait pas que ma liberté s’arrête là où celle de l’autre commence. Une société dans laquelle le respect a foutu le camp. Une société ou la diffamation, le chantage, l’insulte, la délation, le dénigrement sont déifiés. Et avec cela nous aspirons au développement en oubliant que « sciences sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Nous avons encore du chemin.
La Voix Des Décideurs – Jean Pascal EYEBE MPESSE