Coopération minière : Daniel Mackaire Eloung Nna dévoile les 07 engagements de la Russie en faveur du Cameroun
▌ Daniel Mackaire Eloung Nna, Secrétaire National du Processus de Kimberley s’est confié à La Voix Des Décideurs dans une interview exclusive aux lendemains du Sommet Russie Afrique 2023 au cours duquel il a pris part à un atelier traitant des questions de la coopération minière entre la Russie et les pays africains qui regorgent un énorme potentiel.
▌ Cet expert chevronné des questions minières, fait écho de ces engagements de la Fédération de Russie dévoilés par Yuliya GONCHARENKO, Directeur du Département de la Régulation d’Etat de l’Industrie des Métaux Précieux et des Pierres Précieuses au Ministère russe des Finances.
Le Cameroun a participé au plus haut niveau au deuxième Sommet Russie-Afrique 2023 à Saint Petersburg. Quelle est la symbolique de cette rencontre dans la coopération bilatérale entre le Cameroun et la Russie ?
L’efficacité de la diplomatie implémentée parle Président de la République, Son Excellence Paul BIYA a permis au Cameroun non seulement de maintenir mais aussi d’intensifier la coopération avec la Fédération de Russie nonobstant la situation géopolitique assez difficile observée dans le vieux contient depuis quelque temps. La participation du Cameroun au deuxième au Sommet Russie-Afrique est la preuve irréfutable que la coopération bilatérale entre les deux pays se porte bien. Si je m’en tiens uniquement au Sommet de Saint Petersburg, je dirai très objectivement qu’il symbolise un nouvel élan dans les relations bilatérales entre le Cameroun et la Russie qui permettra d’élargir et de diversifier la coopération à certains aspects pertinents requérant une expertise particulière et un savoir-faire avéré.
Vous y avez personnellement pris part en votre qualité de Secrétaire National du Processus de Kimberley. Quelles retombées pour le secteur minier ?
Effectivement, j’ai conduit la délégation du SNPPK aux travaux du Forum économique et humanitaire Afrique-Russie. Ledit forum était dédié aux experts techniques dans divers domaines dignes d’intérêt susceptibles d’ouvrir des axes de coopération entre la Russie et les pays africains en général et le Cameroun en particulier.
L’expérience et les enseignements reçus lors de ces différentes activités ont donné lieu à des discussions pertinentes qui ont été mises à profit pour établir une plateforme de coopération. Cette plateforme contribuera à soutenir les efforts gouvernementaux visant à faire du secteur minier de véritables leviers de développement économique de nos Etats. Pour ce qui est du secteur diamantifère particulièrement, les parties russes et africaines se sont accordées pour :
- Intensifier la coopération entre les pays producteurs de diamants dans le de du secteur diamantifère dans l’industrie, d’échange d’expériences et de meilleures pratiques ;
- Mettre en œuvre une norme unifiée pour l’exploitation responsable des diamants et le développement conjoint d’une norme de diamant durable en tant qu’autorégulation pour le secteur ;
- Mettre en place une plate-forme de coopération pour l’élaboration d’une norme commune au sein de l’Association des Pays Africains Producteurs de Diamants.
Le Cameroun connaît une carence d’expertise en évaluation de diamant. Pourrait-on s’attendre à l’ouverture de filières dans certaines grandes Écoles et Universités camerounaises avec le concours russe ?
Il faudrait noter que l’exploitation du diamant au Cameroun bien que faiblement documentée existait déjà il y a très longtemps. Elle se faisait de façon artisanale avec une technique très rudimentaire. La production quant à elle n’était ni tracée, ni évaluée mais plutôt souvent bradée à des acheteurs qui pratiquaient beaucoup plus le troc. Lorsque le Cameroun a adhéré au Processus de Kimberley et le SNPPK créé, la première action prioritaire que nous avons entreprise était de former le personnel dans les institutions de références en matière d’expertise et d’évaluation des diamants notamment à Dubaï, en Afrique du Sud, en Inde, en Australie et en Belgique pour que nos diamants soient évalués et exportés à leur juste valeur.
Bien qu’aujourd’hui les contraintes budgétaires ne permettent pas d’en former davantage, notre séjour en Russie a été l’occasion d’obtenir des accords de principes pour la formation technique de notre personnel dans le tri et l’évaluation des diamants ainsi qu’en gemmologie. Dans les prochains jours, une 1ère vague du personnel du SNPPK séjournera à Moscow à cet effet.
Sur le plan académique, nous savons que le Chef de l’Etat a créé tout récemment l’Ecole Supérieure de Transformation des Mines qui constitue déjà un cadre de formation aux métiers de la joaillerie et autres. Nous encadrons chaque année au moins 70 étudiants de ces écoles dans le cadre de leurs stages académiques. Au cours de ces stages, ces étudiants se familiarisent aux rudimentaires de l’expertise et de l’évaluation des diamants.
Toutefois, l’incorporation de ces formations dans les curricula académiques relève de la compétence des départements ministériels sectoriels concernés. Cependant, le SNPPK est disposé quant à lui à offrir toute les facilités dans la promotion des professions liées au diamant brut en collaboration avec les experts russes.
L’année dernière, il a été évoqué le projet de mise en place d’une « Task Force » pour là contre trafic des substances précieuses. Où en sommes-nous aujourd’hui ?
Il faudrait reconnaitre ici que cette « Task Force » existait déjà. Il était question de la formaliser selon notre cadre règlementaires et exigences du Processus de Kimberley. Pour ce faire, un certain nombre d’activités ont été réalisées.
Au lendemain de la tenue de l’Atelier sous régional du Processus de Kimberley de Haut niveau sur la lutte contre la fraude et les trafics illicites des diamants en Afrique centrale, nous avons organisé un séminaires de renforcement des capacités des acteurs institutionnels impliqués dans la lutte contre les trafics et la contrebande des substances minérales dans les aéroports internationaux du Cameroun sur le cadre institutionnel et règlementaire qui encadre cette activité, les missions de chaque institution en la matière, les procédures de saisie et la dévolution des matières saisies, les techniques d’identification des substances minérales par imagerie X ainsi que les principes et exigences du Système de Certification du Processus de Kimberley relatifs à la traçabilité et aux contrôles internes.
Ensuite, nous avons Elaboré notre manuel de procédures d’exploitation normalisées relatives aux opérations sur les plateformes aéroportuaires qui est actuellement en cours d’approbation par l’autorité compétente.
En juillet dernier, nous avons organisé une retraite pour élaborer les mémorandums d’entente entre les administrations qui définiront les rôles et les tâches de chaque administration dans le dispositif national de lutte contre les trafics sus évoqués. Nous envisageons finaliser ces procédures et documents d’ici la fin de l’année pour rendre formelle et totalement opérationnelle notre « Task Force ».
Quelles perspectives pour le secteur minier Camerounais et en particulier le Processus de Kimberley ?
Le Cameroun est doté d’un potentiel géologique et minier éloquemment avéré qui ne demande qu’à être valorisé. Il sera question dans un premier temps d’intensifier la coopération avec des pays de tradition minière comme nous sommes en train de le faire avec la Russie, en vue d’attirer encore plus d’investisseurs miniers.
Il sera également question de mettre en place des plateformes de coopération en matière de renforcement de capacités, de transfert de technologie et d’acquisition d’équipements techniques qui nous permettront de transformer localement nos minerais et supprimer dans le long-terme leur exportation sous forme brute.
Pour ce qui est du Processus de Kimberley, nous sommes ravis des opportunités offertes lors de ce forum. En effet la Fédération de Russie par l’entremise de Mme Yuliya GONCHARENKO, Directeur du Département de la Régulation d’Etat de l’Industrie des Métaux Précieux et des Pierres Précieuses au Ministère des Finances de la Fédération de Russie, s’est engagée à :
- Former gratuitement les cadres de l’administration sur le contrôle de l’Etat, la gemmologie, le tri et l’évaluation des diamants bruts ;
- Élargir des quotas pour les étudiants dans les universités russes ;
- Etudier la possibilité de créer un laboratoire d’expertise et d’évaluation des pierres et métaux précieux avec les équipements de pointe russes ;
- Transférer la technologie russe en matière d’essai pour la délivrance des certificats de conformité, de digitalisation des systèmes d’information sur la traçabilité des substances minérales précieuses ;
- Faciliter l’acquisition d’équipements techniques de pointe adaptés aux footprint et fingerprint des diamants camerounais ;
- Assister le Cameroun dans la prospection géologique et minière en vue de découvrir des gisements diamantifères ;
- Offrir l’opportunité aux bijoutiers camerounais de participer aux foires et expositions organisées en Russie.
Propos recueillis par Marcien Essimi
