Cameroun : Comment la propagande des ONG internationales menace la survie des agro-industries
Terres de conservation, terres agricoles et et développement économique: Le Gouvernement camerounais doit mettre de l’ordre
La préservation de la biodiversité est un défi qui se met à l’épreuve du développement économique. Cette équation place le Cameroun est au carrefour des contradictions qui traversent les initiatives globales sur la forêt. L’agriculture industrielle, l’exploitation forestière et minière peuvent –il se réaliser sans compromettre les acquis de la gestion durable des forêts ?
L’hypothèse de la conservation
Au nord du pays, trois grands parcs nationaux emblématiques sont menacés d’occupation. Aux confins de la frontière avec le Tchad, les orpailleurs prennent le large sur le Parc National de Bouba Ndjidda. Les éleveurs transhumant aussi. Ils ne se sont pas arrêtés là. Saisonnièrement, ils viennent pètre leurs troupeaux dans les Parcs de la Bénoué et non sans difficulté dans les amodiataires des zones de chasse périphériques.
Route Nationale N°1
Sur la section Mbe-Garoua, des villages naissent au fil des mois et menacent l’existence du Parc de la Bénoué. Vue sur la route, ce qui reste de végétation dans la façade extérieure de cette aire protégée n’est qu’une peinture qui cache la réalité intérieure. Les populations se ravitaillent en bois de chauffe pour leurs besoins en énergie et même pour leur subsistance. Le commerce du bois fait florès sous le regard dépassé des voyageurs. Les noms de ces villages; Bagda, Lagda rappellent les réalités culturelles et cosmogoniques de l’Extrême Nord. Ce sont des réfugiés climatiques. La situation de ces gens n’inquiète pas encore. Mais leur arrivée ici, mais surtout le développement exponentiel des villages devraient sonner la côte d’alerte.
La culture du coton est un pied de nez sur la conservation dans cette vaste région qui conserve encore ses richesses fauniques malgré un événement triste intervenu dans les années 2000, la disparition du rhinocéros noir. Autrefois paradis de la biodiversité, le nord Cameroun est aujourd’hui menacée.
Plus au nord, c’est le Parc national de Waza qui se rétrécit. La vie reprend peu à peu ici mais les marques des années de crise sécuritaire restent indélébiles.
La poussée démographique aggrave les conflits homme/faune. Pendant la saison sèche, les éléphants qui veulent se désaltérer vont s’approvisionner dans des sources d’eau aménagées pour les populations. La valorisation des aires protégées ici ne suffit plus. Il faut leur donner une âme et la valeur économique qu’elles méritent pour redorer le blason de l’écotourisme. Cela ne peut plus se faire par des mesures sectorielles seules mais par un engagement étatique de très haut niveau.
L’agriculture industrielle en souffrance
Les situations conflictuelles se multiplient. Dans la vallée du Ntem, ce sont les populations qui sont aux prises avec le projet d’installation d’une unité agro industrielle pour la promotion à grande échelle de la cacaoculture. Son promoteur veut approvisionner une unité industrielle installée à kekem à l’Ouest. Ces populations veulent savoir les contours de l’attelage qui a permis le montage de ce projet et au besoin en être parties prenantes.
La propagande des ONG internationales menace la survie de Sud Hévéa
Dans le Djà et Lobo, c’est un autre cas pratique de promotion de l’agro-industrie en difficulté. Une firme Camerouno-malésienne a démarré la promotion de l’hévéa culture. Le problème, cette activité confine avec la réserve du Djà, érigée par l’Unesco comme patrimoine de l’humanité. La propagande des ONG internationales au premier rang desquelles GreenPeace fait perdre le sommeil au promoteur et menace la survie de Sud Hévéa, entreprise promotrice.
Dans le département de l’Océan c’est une autre firme agro industrielle qui est aux prises avec les mêmes acteurs de la conservation qui ne perdent pas un seul cran de leur audace.
Malgré l’adhésion prouvée de la population et les investissements lourds déjà consentis, ils ne désarment pas et veulent anéantir ce projet qui fonde les espoirs des populations de la localité. Il ne fait pas bon se rapprocher des animaux pour réaliser un projet aujourd’hui au Cameroun. Malgré les engagements écologiques de Camvert, les ONG défenseurs de l’environnent ne décolèrent pas.
Même dans les anciennes possessions agricoles comme Tiko, Njombe-Penja, Niete ou se pratiquent l’agro-industrie depuis des lustres l’activité, des firmes agricoles ont sous la surveillance étroite des ONG et des forces transnationales.
De toutes les activités entropiques, celle-ci est l’ennemi jurée N° 1 des ONG et de nombreux pays agroforestiers de l’Europe du Nord. Les activités d’exploitation forestière ont maintes fois été la cible des fora internationaux. Le bannissement de l’exploitation des forêts primaires est dans l’agenda international des ONG qui estiment qu’un développement propre est incompatible avec la coupe des arbres.
Le Cameroun est au carrefour des contradictions qui traversent les initiatives globales sur la forêt
Le Cameroun est au carrefour des contradictions qui traversent les initiatives globales sur la forêt. Deuxième massif forestier dans le bassin du Congo avec 22, 5 millions d’hectares, le Cameroun a adhéré à l’essentiel des processus post Rio de Janeiro de 1992. Il a mis en conservation 30% de son territoire pour prouver sa volonté de participer à l’effort mondial de lutte contre les changements climatiques.
Mais le secteur forestier demeure prépondérant dans son économie avec une participation au PIB de 4%. Pourvoyeur d’emplois, 25 000 personnes dépendent directement des revenus forestiers et 150 000 indirectement. Plus de 100 communes forestières tirent l’essentiel de leur revenu de l’exploitation forestière. Elles ont perçu environ 160 milliards de FCFA de redevance ces dernières années.
Selon des sources dignes de foi, la question du décret de classement du massif forestier d’Ebo a éclipsé une autre décision en gestation en faveur de l’écologie. Pour préserver les acquis du Parc national de Campo Ma’an des effets du développement futur du Port de Kribi, l’Etat du Cameroun en entrain de faire la mutation de deux Unités forestières d’aménagement de la fonction de production à celle de la conservation.
Cette surface de 100 000 ha de forêts constituera la barrière protectrice à ce parc national riche en biodiversité. Sans doute, une explication de cette décision majeure, qui arrive au lendemain de la ratification par le Cameroun d’une convention internationale sur la protection des primates, aurait pu atténuer les effets des critiques actuelles sur ce pays qui a déjà beaucoup fait en matière de gestion durable de la biodiversité.
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Le Cas spécifique du grand Mbam
A 120 km au Nord-est de la ville de Yaoundé, deux départements, le Mbam et Inoubou et le Mbam et kim sont au cœur des convoitises. Ils sont devenus deux destinations agricoles de prédilection. Tout le monde rêve d’y aller pour installer une exploitation. Mais le Grand Mbam est aussi une vaste prairie. Les bergers transhumants viennent de l’Adamaoua, du Nord-ouest, de la RCA voir du Nigéria pour y trouver refuge en raison de l’abondance de l’herbe fraiche. Les lions qui ont semé la terreur en 2019 ont aussi trouvé là de la nourriture facile.
Au-delà de ces avantages, il faut avouer que cette région cessera d’être une réserve foncière rêvée. L’occupation désordonnée et la grande braderie actuelle du patrimoine foncier des deux départements du grand Mbam inquiètent et appellent à la discipline. Les problèmes qui vont se poser dans cette région risquent d’être plus graves que ceux se posent actuellement dans le Ntem et ailleurs.
Source : Les Grands Débats N°18 Août 2020